Khatchkars, la foi et la pierre.
par Arthur Hadjian
Parmi
les
multiples
expressions
d'une
ardente
dévotion
au
christianisme,
la
tradition
des
khatchkars
constitue une contribution très originale du peuple arménien à l'art religieux du Moyen Âge.
"Croix-pierre"
,
sens
littéral
du
mot,
le
khatchkar
est,
en
réalité,
une
stèle
ornée
d'une
croix
sculptée
sur
la
face
orientée.
Il
se
situe
dans
la
continuité
des
diverses
formes
de
croyances
antérieures
ancrées
dans
le
roc
du
pays
arménien
:
mégalithes
préhistoriques,
vichaps,
stèles
de
l'Ourartou
puis
de
l'Arménie
païenne.
A
l'ère
chrétienne,
ces
stèles
deviennent
khatchkars
pour
la
vénération
de
la
Croix.
En
884,
après
trois
siècles
de
domination
arabe,
le
prince
Achot
est
couronné
roi
d'Arménie
sous
le
nom
d'Achot
Ier.
Ce
représentant
de
la
lignée
des
Bagratouni
restaure
ainsi
une
souveraineté
abolie
depuis
428
par
la
Perse
sassanide.
Son
règne
se
traduit
par
une
remarquable
renaissance
économique,
culturelle
et
religieuse.
C'est
à
cette
époque
que
l’on
situe
l’apparition
des
premiers
khatchkars
datés.
Ils
sont
créés
pour
commémorer
des
évènements
importants
:
fondation
d’édifices
religieux
et
publics,
restauration
de
la
paix
etc.
Érigés
comme
pierres
tombales
dans
les
cimetières
mais
aussi
en
de
multiples
lieux,
ils
reçoivent,
dans
le
silence,
les
confidences
et
les
espérances
des
fidèles.
Leur
protection
est
demandée
aussi
pour
conjurer
le
«
mauvais
œil
»
et
les
influences
maléfiques
qui
menacent
la
famille,
les
animaux
ou les récoltes à venir
.
La
période
archaïque
Dans
la
période
initiale
archaïque
(photo
1),
du
9ème
au
11ème
siècle,
ce
sont
les
débuts
de
l’élaboration
esthétique.
Le
premier
khatchkar
daté
avec
certitude
est
celui
que
fait
élever,
en
879
à
Garni,
Katranidé
l'épouse
d'Achot
Bagratouni.
Sa
façade,
plate
et
rectangulaire,
comporte
une
croix
simplement
dessinée
par
un
sillon
profond
incisé
dans
la
masse.
Le
khatchkar
de
Tékor
(964)
présente,
par
contre,
une
croix
sculptée
et
saillante
dans
un
cadre
évidé.
Parmi
les
formes
anciennes
on
trouve
souvent
une
forme
ovalaire
ou
en
fer
à
cheval.
La
croix
possède
une
longue
branche
inférieure
et
des
extrémités
bilobées
(plus
tard
trifurquées).
Elle
idéalise
l'arbre
de
Vie
avec,
en
haut
de
chaque
côté,
des
fruits
(grappes
de
raisin,
grenades)
appendus
à
une
tige
née
du
sommet
de
la
branche
supérieure
;
la
partie
inférieure
comporte
une
pyramide,
à
degrés,
des
feuilles
stylisées,
issues
de
la
base
et
remontant
de
chaque
côté
ou
deux
petites
croix
en
symétrie
(khatchkar à triple croix). (photo 1)
La
période
classique
Du
11ème
au
14ème
siècle
on
assiste
à
l’évolution
vers
le
modèle
classique
(photo
2):
une
dalle
épaisse,
rectangulaire
ou
légèrement
évasée
vers
le
haut.
Fixée
sur
son
socle
par
un
assemblage
à
tenon
et
mortaise
elle
atteint
deux
mètres
ou
plus
de
hauteur.
Sa
partie
supérieure
est
ornée
d’une
corniche
ouvragée,
horizontale,
concave
et
en
surplomb
au
dessus
de
la
façade.
Typiquement,
celle-ci
comprend,
de
haut
en
bas,
un
cadre
rectangulaire
dans
lequel
est
incluse
la
croix
puis,
au
dessous,
le
disque,
source
de
germination.
De
chaque
côté,
les
bordures
du
cadre
comportent
une
série
de
motifs,
entrelacés
ou
superposés
;
dans
le
cadre,
la
croix
prend
son
aspect
définitif
avec
le
symbole
de
la
trinité
à
chacune
de
ses
huit
extrémités.
La
surface
qui
entoure
la
croix
et
les
autres
motifs
va
être
comblée
par
de
fins
entrelacs
à
type
de
ruban,
de
motifs
végétaux
ou
de
vannerie.
D’importantes
figurations
ornent
parfois
l’ensemble
:
au
niveau
de
la
corniche,
différentes
scènes
telles
que
la
Vierge
à
l'enfant,
le
Christ
en
majesté
ou
une
Déisis
;
tout
en
bas,
au
niveau
du
socle,
l’éventuelle
présentation
du
commanditaire.
Certains
chefs-d'œuvre,
d'une
virtuosité
extrême,
reproduisent
dans
la
pierre,
les
motifs
traditionnels
de
la
dentelle
à
l'aiguille
(photo
3).
Durant
cette
période
on
trouve,
en
outre,
une
variante
exceptionnelle
où
la
croix est remplacée par une scène de dé-crucifixion du "Sauveur de tous" (Amenap'rkitch) (photo 4).
De
nos
jours
Après
avoir
atteint
son
modèle
canonique
le
khatchkar
perdure
au
fil
des
siècles.
En
république
d’Arménie
et
en
diaspora,
chacun
d’eux,
unique
par
tradition,
atteste
dans
la
durée
une
présence
arménienne
passée
ou
actuelle.
Véritable symbole identitaire, le khatchkar est le veilleur de pierre de la mémoire collective du peuple arménien.
Note additionnelle
17
novembre
2010
L'Organisation
des
Nations
Unies
pour
l'éducation,
la
science
et
la
culture
(UNESCO)
a
déclaré
les
khatchkars
arméniens
comme un patrimoine culturel immatériel nécessitant une sauvegarde urgente.
Les
khatchkars
sont
décrits
comme
des
«stèles
taillées
dans
la
pierre
en
plein
air"
par
des
artisans
en
Arménie
et
la
diaspora,
et,
qui
sont
utilisés comme points focaux pour le culte, pierres tombales, et des reliques afin de «faciliter la communication entre le profane et le divin."
Ces
pierres
sculptées
à
la
main,
sont
d’environ
jusqu'à
1,5
mètres
de
hauteur
avec
une
croix
ornementale
gravée
sur
le
symbole
d'un
soleil
ou
la
roue arménienne de l'éternité et généralement accompagnée par des sculptures de saints, d'animaux ou d'autres motifs géométriques.
Le
rapport
fournit
un
compte
rendu
détaillé
du
processus
d'élaboration.
Les
«Khatchkars
sont
créés
en
général
avec
la
pierre
et
gravé
à
l'aide
de
ciseaux, stylos pointus et des marteaux. Les sculptures sont ensuite broyées à l'aide de sable fin.
Le
document
souligne
aussi
le
caractère
national
de
l'artisanat
des
Khatchkars,
qui
est
"transmis
par
les
familles
ou
de
maître
à
apprenti,
de
l'enseignement des méthodes traditionnelles et les modèles, tout en encourageant les particularités régionales et l'improvisation individuelle."
Selon
l'application,
chaque
Khatchkar
est
tout
à
fait
unique,
avec
son
propre
modèle
et
le
design.
Il
ya
plus
de
50.000
khatchkars
en
Arménie
avec
des
milliers
d'autres
dans
le
monde,
en
diaspora
et
sur
les
territoires
historiques
de
l'Arménie
dans
la
Turquie
actuelle,
l'Azerbaïdjan
et
'Iran.
Une
fois
le
Khatchkar
terminé,
une
petite
cérémonie
religieuse
a
lieu
de
consacrer
le
nouvel
édifice
Khatchkar.
Une
fois
béni
et
oint,
le
Khatchkar
est
censé
"possèder
des
pouvoirs
sacrés
et
peut
fournir
de
l'aide,
la
protection,
la
victoire,
longue
durée
de
vie,
du
souvenir
et
de
médiation vers le salut de l'âme», explique le rapport.
Photo 1 khatchkar
archaïque
à triple croix (Etchmiadzin) Photo 2 khatchkar du XIII siécle (monastére de Kécharis
Article paru dans Azad magazine, reproduit ici avec l’aimable autorisation de l’auteur A Hadjian
Photo 3: khatchkar “Armenap kitch” Photo 4 khatchkar dentelle de pierre
sculpteur Vahram - 1273 sculpteur Poghos -1291
L’association des Français d’origine arménienne et de leurs amis dans le grand Ouest de la Bretagne aux pays de Loire
MZA V11.1
©menezarat.fr